Et oui, j'ai fini par sortir de la forêt. J'y étais pas mal, dans la forêt, pour tout dire, mais y a quand même moins de gibier que dans la savane, et j'ai un appétit d'ogre depuis mon histoire de panthère. J'ai donc finis par descendre en ville, piquant des fringues dans un jardin pour passer à peu près inaperçu au milieu du reste du monde. Même si j'ai la chair de poule, l'équivalent humain du poil hérissé, faut croire, à sentir toutes ces odeurs de vampires me passant dans le nez. Ça pue, c'est une horreur.
J'avance au milieu des rues jusqu'à trouver un coin où l'odeur est moins tenace, pour me retrouver face à un bâtiment avec un éclairage violent sur lequel défile des mots à pleine vitesse. Si je sais lire? J'ai trainé à l'école, un peu. Alors ouais, j'ai les bases.
Je m'assied au sol, sur le bitume du trottoir, avant de sortir de sous ma veste le morceau de pain fourré que j'ai chipé deux rues plus tôt. J'ai pas franchement d'argent sur moi, entre une panthère qui trouve tout ce qu'il lui faut pour manger dans la savane, et une vampire qui trouve tout ce qu'il faut pour manger dans la savane (vous la voyez la répétition? Elle est volontaire), bah de l'argent, comment dire que ça ne nous sert strictement à rien. Sauf qu'ici, la savane est loin, et si j'en crois la louve - Leah - que j'ai croisé il y a quelques jours, la concurrence alimentaire est rude. Une meute de "loups"- les chacals locaux, apparemment - et une bonne quinzaine de vampires "végétariens" - les yeux dorés, comme Ami -, la forêt se vide plus vite qu'elle ne se remplit.
Bref, mon repas avalé en trois bouchées, j'ai encore la dalle moi. De quoi dévorer un éléphant!
Je me relève alors, et c'est là que je la remarque. Cette femme qui me fait enfin affirmer que c'est pas l'appartheid ici encore. Parce que des Blancs, ça, j'en ai vu à la pelle. Je commençais à désespérer. Même si mon teint s'est plus qu'éclairci en grandissant, ils ont ce truc pour vous repérer du premier coup, c'est infect. Si je l'aborderai? Pas du genre à sauter sur les gens. Je me contente d'un "bonjour" poli quand elle passe à ma hauteur.

Il faisait un temps magnifique aujourd'hui et j'avais donc décidé d'en profiter pour sortir. J'avais un rendez vous en fin d'après-midi, mais d'ici là je me baladais. mon fils été à l'école et mon époux travaillait, j'étais donc seule sur ce coup. Je mangeais un morceau dans un restaurant, je passais par la bibliothèque, une boutique d'apothicaire et une autre d'antiquité avec à chaque fois des gens charmant pour t’accueillir malgré les yeux rouges de certains.
En sortant de l'une d'entre elles un jeune assis sur le trottoir se releva et me dis simplement bonjour dans un sourire. Je lui répondais tout aussi poliment, Je ne fis pas attention à lui plus que ça, je ne songeais qu'à ma fille, à mon fils et mon époux qui nous attendait plus tard dans la soirée pour que tous puissent faire connaissance. J'avais vraiment hâte et en même temps j'avais peur de la façon dont ça pouvait se dérouler et de la suite des événements.

Un papier tombe de ma poche à ce moment là, mais je continue mon chemin. Je ne m'en rends pas compte, je suis bien trop absorbé dans mes pensées.

La femme que j'ai salué sur sa route me répond d'un bonjour poli sur ses pas. Ami ne pourra pas dire que j'ai fait mon ours aujourd'hui. Vrai que depuis que c'est elle et moi, j'ai eu tendance à m'éloigner de tous ceux qui ne rentrent pas dans ce "elle et moi". Je m'apprête à reprendre ma route en direction de la forêt - une fois que j'aurai retrouvé la forêt au milieu de ces baraquements de pierre et de béton -, quand mon regard capte un mouvement du coin de l’œil. Un papier tombé de la poche de la femme. Ma bonne éducation me perdra. Je marche jusque là pour le ramasser d'un mouvement fluide avant de prendre une allure plus soutenue pour rattraper la propriétaire.

"Excusez-moi madame. Vous avez fait tomber ça."

Je me rapproche d'elle en quelques foulée de "course" lente, la dépassant avant de m'arrêter devant elle pour lui glisser la note entre les mains.

"Pardonnez-moi, je sais qu'on ne se connait pas mais... voudriez-vous que je vous accompagne sur un bout de chemin? Les rues ne sont pas sures pour quelqu'un comme vous."

Quelqu'un comme elle? Une femme noire dans une ville de blancs, y a pas à chercher loin le dessin pour dire qu'elle risque de regretter sa virée en solitaire. L'Apartheid est terminé depuis plus de vingt ans? Dites le donc à ces maudits européens. Les panneaux "Blancs seulement" ont peut-être bien disparu des devantures des magasins, mais quand vous y entrez, ils vous font bien comprendre que c'est pas chez vous l'Afrique.

J'entends une voix qui se met à parler de plus en plus fort, qui parle à une dame, mais je ne songe pas qu'il puisse s'agir de moi et franchement j'ai pas la tête à ça. Il est bientôt devant moi à me tendre un bout de papier. Je sens un coup d’électricité au moment ou il me passe ce papier comme cela arrive parfois, si l'on a tenu du métal quelque instant plutôt. L'effet passe aussitôt et je souris au jeune homme ayant couru jusqu'à moi. Ce papier n'était vraiment pas important, mais si c'est moi qui l'est fait tombé, il est normal qu'il me le signale. Je ne vais donc pas le jeter tout de suite, je verrais cela plus tard, juste pour le principe. je le mets dans mon sac de façon à ce qu'il ne s'échappe pas de nouveau.

- Oui, je vous remercie.

Il me propose ensuite de m'accompagner, parce que selon lui les routes ne sont pas sures pour quelqu'un comme moi. J'arque un sourcil et je ne comprends pas ce qu'il se passe. De quoi parle-t-il? Pour une humaine ? Pour une métisse ? A vrai dire je ne pense pas vraiment au coup de la métisse. Bien sur j'ai eu droit toute ma vie a des réflexions à ce sujet, mais je n'y prends pas garde et à l'heure actuelle, ce n'est pas ma priorité.

- De quoi parlez vous ? Je ne suis pas sûre de vous suivre!

Je le regarde mit intriguée, mi amusée. il me prend pour qui lui ? De la chaire fraiche ? Je ne suis qu'une humaine certes, mais je ne vais pas me laisser faire, hors de question.

Le papier rendu, je fourre mes mains dans mes poches, remarquant que ma proposition lui semble étrange. Au moins, elle n'a pas l'air de mal la prendre. J'ai perdu le truc pour être aimable il y a longtemps. Non pas que je sois désagréable, mais "bien parler en société", c'est parti loin. Je dis ce que je pense quand je le pense, et tant pis si ça déplait.

"Je ne suis pas du coin, mais par chez moi, les Blancs ne sont pas tendres avec les gens de couleur. Encore moins avec une femme seule le soir."

Le fait qu'elle soit une "humaine sans défense"? Ça ne m'a pas vraiment traversé l'esprit. Bien sur que le coin est dangereux, avec tous ces suceurs de sang qui trainent, mais si je me donnait pour mission de surveiller chaque humain qui passe par ici, je n'aurai pas fini. J'ai beau être croyant, les grandes missions divines, c'est pas pour moi. J'ai bien assez d'une vampirette à gérer.

"Enfin, si je vous dérange plus qu'autre chose, laissez tomber. Je ne veux pas vous imposer ma présence non plus."

- Ce n'est pas non plus l'apartheid! La vie n'est pas toujours simple, je vous l'accorde. j'ai connu bin des déboires de ma naissance jusqu'à notre arrivée ici. Je crois quand cette période les gens ont mûrit. Je n'ai pas eu à souffrir du racisme depuis que je suis ici. je crois que les gens en ont pris l'habitude avec les années.

Je place mes mains devant moi. Je ne veux pas lui paraître désagréable. Comment dois-je réagir devant ce je ne homme qui ne veut visiblement que mon bien, alors que je pense pouvoir gérer cette situation seule, si il y avait lieu.

- Et bien, accepteriez vous de faire un bout de chemin avec moi. Je dois aller voir ma fille à quelques rues d'ici. Votre compagnie me serait des plus agréables.

Je reprends donc ma route. Me suivra t-il ou non, je l'ignore. A lui de voir.

- D'où venez vous ainsi ? Je veux dire avant d'arriver dans cette ville.

"L'Appartheid n'a pris fin que quelques années avant ma naissance. Ce n'est pas si vieux. Et encore bien ancré dans les esprits."

Elle me semble plus âgée que je ne le suis, il m'étonne qu'elle me parle de l'Appartheid comme s'il n'avait jamais existé. Ou bien elle habitait dans un pays qui ne l'a pas connu avant d'arriver ici. Pas impossible, pour peu qu'il existe quelque part des Blancs capables de regarder les Noirs comme leurs égaux.

"Avec plaisir. Ça occupera un peu de ma soirée. Ma sœur n'a de cesse de me répéter que je devrais me sociabiliser un peu."

Je reste à sa hauteur alors qu'elle reprend sa route, finissant par entamer la conversation. Ce qui m'arrange. On ne peut pas dire que je sois bon à cet exercice. Comme dit, passé Ami, mon cercle de relations est quasi inexistant aujourd'hui.

"Dernièrement, je parcourais le parc Kruger, en Afrique du Sud. On y est bien mieux installé qu'a Johannesburg. Et vous? Vous êtes de quel coin?"

J'ignorais que l'aparteid était toujours aussi frais dans l'esprit des africains. je n'avais jamais eu l'occasion de m'y rendre. A mon époque on ne voyageait pas des masses et une fois morte je ne m'étais pas rendu la bas. Je ne savais donc rien de ce pays et ses traditions, j'avais peut-être parlé un peu vite.

- Oh pardonnez moi, je ne voulais pas vous offenser. C'est juste que les choses ont tellement évoluer entre l'époque de ma jeunesse et aujourd'hui. Ce n'est pas si vieux que cela effectivement, mais ici nous ne sommes pas en Afrique du Sud et ce n'est pas un monde idéal, mais il y a  des lustres que je ne me suis pas faites agresser pour ma couleur de peau.

Oh bien sur une fois dans l'afterlife le racisme ne disparaît pas vraiment, mais les gens se découvrent d'autres priorité... enfin de ce que j'en ai constaté tout du moins.
Sur ceux nous nous mettons a marcher.

- Je viens de Chicago, j'y ai passé toute mon enfance. Là dernièrement, j'étais ... j'étais loin d'ici, un peu comme dans un autre monde, d'où  ma réflexion de tout à l'heure... Je m'en excuse encore!

Le parc Kruger ? Ce n'est pas un parc protégé pour les animaux sauvages ? Je n'y connais pas grand chose, mais ce nom me semble familier. Qu'irait-il faire là bas ? Bon ok ça ne me regard pas après tout!

- Ce doit être un lieu magique ce parc, non ? De ce que j'en est entendu dire en tout cas! Travailler là bas doit être fantastique avec tous ces animaux!

Je chasse l'air de ma main pour lui signifier qu'il n'y a pas d'offense, lui offrant un regard en coin avant de lui répondre.

"Alors profitons-en le temps que ça dure. Même si j'imagine que ma méfiance à leur égard me fasse paraitre raciste en retour. Disons que j'ai mes raisons."

Elle s'excuse encore, ce que j'omets de relever, inutile d'y revenir, quand elle m'explique qu'elle était partie loin pendant un petit bout de temps. A vrai dire, son explication de "autre monde" n'est guère claire, mais je peux imaginer qu'un Anglais débarquant en Afrique du Sud puisse considérer ce pays comme un "autre monde", et honnêtement, cette ville dans laquelle nous sommes arrivés contre notre gré, ça aussi s'en est un.. honnêtement? Je prend le prochain train pour l'Afrique quand vous le voulez!

"Je comprend. Je voulais voyager quand j'étais enfant. Entendre ces touristes parler de leurs pays... ça avait quelque chose de fascinant...et finalement, j'ai réalisé qu'on est jamais mieux que chez soi."

Bien que "chez soi" ai une signification particulière pour moi. Ma nature me lie à ces terres que je me sens obligé de protéger. Mais mon cœur ne voit qu'un seul chez moi. Ma famille. Ce qui se limite actuellement à Aminata. Nos natures sont radicalement opposées, mais c'est un défi que nous avons largement relevé au fil des années.

"L'écrin est magnifique. Dommage qu'il soit abimé par les touristes et autres braconniers... Parfois je comprend ceux qui décident de faire justice eux-même les concernant."

Ce qui signifie? Que Ami a choisi de lutter contre son besoin de sang humain... mais face à certains humains... je ne la jugerai pas si elle décidait de voir les choses autrement.

Jamais mieux ailleurs que chez soi ? Je suis bien d'accord avec lui. J'avais grandit à Chiacgo avant de partir avec ma fille, puis d'y revenir une fois dans l'afterlife et dans être une fois de plus éloignée... J'avais ma famille avec moi, heureusement, mais je ne m'y sentais pas tout à fait chez moi... Le mal du pays je crois que ça s'appelle.

- Je suis bien d'accord avec vous. Je m'en rends d'autant plus compte aujourd'hui que nous n'avons pas le choix de notre lieux de vie...

Il me parle du magnifique paysage, mais aussi du braconnage et de tout ce que cela engendre. Je perds mon sourire. Il a raison, ce genre de comportement est inacceptable. Ça ne devrait même pas existé.

- Vous viviez dans le Parc ? Vous travaillez là bas ? Vous y faisiez quoi ? Vétérinaire ?

Je suis réellement très curieuse. Je n'ai jamais eu l'occasion de m'y rendre et il me fait envie avec son explication, malgré le braconnage. Après tout le braconnage il faut lutter contre et vu son regard il est plutôt de cette avis. Si un jour nous sortons d'ici je devrais proposé à Elias, mon mari, que l'on se rende là bas quelques temps. Histoire de visiter et peut-être d'aider si nous le pouvons. Mais ça je ne le dis pas au jeune homme devant moi, ça ne se fait pas.... ça s'appelle de la vantardise après!

J'incline la tête devant la véracité de ses dernières paroles. Si vous pensez qu'une grotte dans la forêt est un choix de vie pour moi... Je préfère de loin une tanière dans la savane. Bien plus confortable. Et il y fait meilleur, point de vue température... quand à la pluie? Suffit de suivre les troupeaux de gnous et vous êtes pas mal lotis. Ils arrivent à se débrouiller pour passer après la saison des pluies et avant la saison sèche. Accessoirement, ça peut être utile pour un chasseur de suivre ses proies, non?

"Je dois dire que les grands espaces me manquent. Cette ville est mortifère. Et les alentours... impossible de marcher dix pas sans se manger un arbre..."

Apparemment, le parc la fascine. Il n'y a qu'à voir le regard d'enfant qu'elle prend quand elle en parle. Ouais, parait qu'en Europe, ils ont de très bons documentaires sur la migrations des herbivores.

"Je me contente d'y vivre. Comme d'autres populations y vivant. Je chasse le phacochère et boit l'eau de la rivière. Et je dors souvent à la belle étoile."

Quelque part, sans doute que les Européens comptent sur nous autres locaux pour leur signaler la présence d'un cadavre d'éléphant ou d'un bébé rhinocéros. Je crois même qu'ils payent pour ça. Moi, je me contente d'égorger un braconnier de temps à autres, quand ils ne me tirent pas dessus. Aux dernières nouvelles, on est toujours à la recherche d'un léopard géant dans le parc.

- Oui j'imagine. Connaître une telle liberté avant de se retrouver piéger ici doit être vraiment lourd à supporter. Même là où j'étais avant, j'avais plus de place qu'ici!

Je ne termine pas cette phrase, me rendant compte qu'elle n'a pas vraiment de sens quand on ne sait pas où j'étais jusqu'à mon arrivée ici. J'en ai des étoiles pleins les yeux, rien qu'à l'écouter parler. Je retrouve mon âme d'enfant en cet instant.

- Vous êtes nombreux à vivre ainsi ? Je pensais que c'était une réserve privé... enfin privé je sais pas, mais j'ignorais qu'il y avait des gens qui y vivait à l'année, sans compter les gens qui travaillent et encore ...

Et là je m'en rends compte en parlant que cette curiosité pour son mode de vie peut-être mal pris. Je suis intriguée certes, mais je ne veux pas jouer au voyeur pour autant.

- Désolée je ne voulais pas paraître inconvenante. J'espère ne pas vous avoir déranger dans mes questions.

Je me demande soudain, comment un homme comme lui peut-il être ici dans cette prison surnaturelle. Quel est le lien entre lui et ce monde ? Il n'a pas les yeux de ceux comme Edward, ou de veines sous les yeux. A moins qu'il ne s'agisse d'un loup ? Je n'en sais rien et honnêtement, je ne suis pas sûre de vouloir savoir. Ils sont partout ceux là, j'ai l'impression que ma tête va exploser rien que d'y penser. J'ai beau avoir un époux sorcier et avoir été plus de 80 ans dans l'afterlife, j'avais au moins le loisir de choisir dans quel pays me rendre et avec qui vivre, mais ici non impossible... Une seule ville pour quelques milliers d'habitants ... combien de temps allions nous tenir ainsi ? Est-ce que l'homme à mes côtés ferait partit des survivants ou de ceux dont on dénombre la disparition tous les jours ?

- Vous avez une idée de comment vous avez pû venir de l'Afrique du Sud à ... à ici ?

J'ignore où elle était avant et je pense qu'il est déplacé de lui poser la question. Bien que le fait qu'elle dise avoir plus de place qu'ici me donne à penser qu'elle a échappé au sort de "domestique" dans ces grandes maisons bourgeoises tenues par de riches blancs européens.

"C'est oppressant c'est certain. Je n'ai pas l'habitude de la foule. Ni de ce genre de foule. J'ai juste envie de me défouler et courir sans avoir à regarder où je met les pattes pour me prendre un truc dans le nez."

Vous me direz, aussi vaste soit la savane, si vous ne regardez pas où vous allez, vous finissez dans un flanc de buffle... et vous pouvez avoir le gabarit d'un tigre, un buffle, ça a de jolies cornes et ça sait particulièrement bien s'en servir. On dit qu'ils sont capables d'éventrer un lion, je veux bien le croire. J'ai appris à me méfier d'eux.

"Il y a quelques tribus locales qui vivent sur le parc. Pour les européens, ça n'a que des avantages. Des gardes qui connaissent le terrain, un peu de folklore... Pour ma part, je n'y suis pas né, mais j'y ai grandi. Je connais le parc comme ma poche."

Je fais un geste de la main pour lui signifier qu'elle ne m'a pas dérangé avec ses questions, alors qu'elle m'en pose une nouvelle, dont je n'ai pas la réponse. Comment je suis arrivé ici? Très bonne question.

"Aucune non. Je me suis réveillé ici au matin, comme de nombreux autres, à ce que j'ai pu comprendre. J'ignore comment ou pourquoi. Et vous? Une théorie?"

Où il met les pattes ? Ok, je ne vais pas relever, ça ne veut probablement rien dire n'est-ce pas ? Tous les habitants de cette ville ne penche pas dans le surnaturel, si ?
Nous en revenons au parc Kruger. Les quelques tribus qui y vivent font apparemment de bons guides et des attractions en règle générale qui plaisent aux touristes. je comprends son point de vue, mais je peux aussi comprendre qu'on ai envie d'en savoir plus sur un pays, sur ses coutumes et pour cela rien de mieux qu'un parc où tout est regroupés. Je ne sais quoi lui répondre, je ne veux pas être désobligeante ou quoique se soit.

- Oh non je ne sais pas non plus. Certains parlent de sorcières qui nous auraient enfermés ici pour nous punir de quelques crimes, d'autres encore évoquent les extraterrestres.

J'ignore qu'elle idée des deux est la plus dérangeante. Je penche personnellement plus pour les sorcières, en ayant croisé quelques unes dans l'afterlife et sachant de quoi certaines sont capables individuellement, alors à plusieurs, Dieu seul sait ce qui pourrait les arrêter. Rien que d'imaginer ce qu'elles nous préparent d'autre si c'est bien elles, me fait froid dans le dos et j'en ai un frisson.

- Mais aucune n'est vraiment plausible n'est-ce pas ?

Je me demande ce qu'il va en penser et si il me ment est-ce que je saurais le déceler, je l'ignore. Je suis censée tout ignorer du surnaturel, alors je vais jouer les gourdes encore un moment.

Je m'arrête pour me retourner vers elle quand elle évoque les sorcières, paraissant sceptique, mais pas totalement ahurie par cette explication. Ok, il semblerait qu'elle en connaisse plus que je ne le pensait concernant notre monde. Mais par précaution, je vais continuer à faire l'autruche encore un peu.

"Des sorcières ou des extraterrestres... Et ce sont là les seules explications que la rumeur a su trouver? On va bientôt entendre parler de démons et de malédictions."

En vérité, nous serions chez moi... j'imagine que les shamans des différentes tribus se seraient déjà réunis pour invoquer les ancêtres afin de savoir quel démon est à l'origine de ce mal... Ce qui me fait me poser une question... Ami et moi sommes ici... pourquoi pas eux? Il faudra que je fasse plus attention à ceux que je croise. Bien que l'idée de revoir les miens m'effraye autant qu'elle me ferait du bien, dans cette jungle peuplée de dents pointues...

"J'ignore ce qui est plausible. Un matin j'étais parti à la chasse au buffle dans la savane africaine, le soir, je me réveille ici... et je doute que la savane se trouve derrière la première montagne... ou alors l'Afrique a bien changé. Je suis ouvert d'esprit quand il s'agit d'un danger potentiel."

Il à l'air de prendre ça à la rigolade, il n'y a croit pas et trouve ça ridicule. Enfin c'est tout du moins ce que je pense au départ en l'écoutant parler. Il m'explique comment il s'est réveillé dans cette ville et qu'il est assez ouvert d'esprit quand il y a du danger. Donc il ne dit pas non aux différentes suppositions desquels je lui ai fait part.

- De démons ? Oui peut-être. Ou au contraire d'ange. Si vous croyais aux démons vous croyez à leurs exactes opposés! Ils ont pu faire ça pour nous protéger!

Si ça avait été le cas, c'était plutôt mal calculé puisque nous nous retrouvions simples humains avec nos pires ennemis sur la chaîne alimentaire à quelques mètres à peine de là où nous nous trouvions. Les vampires, loups-garou et autre de même genre se trouvaient à chaque coin de rue et il allait être difficile d'y résister bien longtemps. A moins de monter une coalition de chasseur, mais honnêtement entre ma fille hybride, mon époux sorcier et moi et mes gênes nous ne ferions pas long feu; je n'avais aucun intérêt à ça.

- Quoi qu'il se passe et peut importe qui nous a amené ici au final, nous allons devoir nous serrer les coudes. Il se passe des choses étranges ici depuis notre arrivée et il n'y a qu'ensemble que nous pourrons nous en sortir...

J'étais loin de tout comprendre, mais ça j'en étais persuadée, tout mon corps me le crier. Elias aussi ressentait cela.
A force de discuter j'arrivais au fameux bar ou j'avais rendez vous avec Ambre. Je l'aperçu assise à une table à l'extérieur, mais attendait de terminer cette discussion avant de la retrouver.

Nous protéger? En nous envoyant vivre avec assez de vampires pour dire que la population complète de la planète doit en être? J'ai deux trois doutes. Pour protéger le reste du monde en nous sacrifiant au passage, peut-être. Je la laisse cependant dans sa naïveté, trouvant que c'est plus simple que de lui parler des monstres avec lesquels elle vit désormais. Quitte à mourir - ce qui serait dommage, je dois dire qu'elle est fort charmante, sans arrière pensée aucune -, je crois que ne rien connaitre de ce monde et de l'angoisse qui irait avec, c'est la meilleure des façon de finir sa vie ici.

"Chez moi, on préfère craindre l'existence des démons que croire à celle des anges. Il vaut mieux se préparer au pire qu'espérer le meilleur."

Nous serrer les coudes? Qui es ce "nous" dont elle parle? L'ensemble des habitants du coin, tous égaux prisonniers de cet endroit? Les humains des environs? Ce qui signifierai qu'elle ai connaissance de la nature de certains de ses voisins... mais pas de la mienne.

"La question reste de savoir ce que nous pourrions faire à notre petite échelle."

Je l'observe en silence jeter un œil au bar à coté duquel nous sommes arrivés, tout son corps montrant qu'elle aimerait bien me laisser pour s'y rendre, mais sans savoir comment ne pas se montrer indélicate vis à vis de moi. Lui rendre la tâche plus aisée? Je dois bien avoir un rendez-vous quelque part.

"Ça vous embête si je vous laisse à présent que nous avons rejoint des rues plus animées? J'ai apprécié notre conversation, mais j'avais oublié que j'étais attendu."

J'aimais bien son expression sur les anges et les démons. Je suis née dans la religion chrétienne et j'en garde quelques stigmates, mais je suis assez ouverte à l'échange. De notre côté, nous avons peut-être d'avantage d'espoir, je ne sais pas. Je ne suis pas sure de comprendre ce que cela signifie, mais je sais qu'à tête reposée je pourrais d'avantage y réfléchir. Et je compte bien le revoir pour en reparler ultérieurement.

Oui, nous tous, réunis, dans cette ville de malheur. Je savais qu'il y avait des vampires, des loups et autres, mais j'étais incapable de faire la différence entre un vampyre non assoiffé et un humain et un loup hors pleine lune, je n'étais qu'une humaine. J'avais la théorie sur le surnaturel, mais pas la pratique et honnêtement j'espérais ne jamais l'avoir. Sinon cela voudrait dire que je m'étais transformé en loup, grâce aux gènes parcourant mon corps, mais pour cela j'aurais tué quelqu'un, et ce n'est pas prévu au programme. J'ai su y échapper jusqu'à présent, je souhaite que ça continue ainsi le plus longtemps possible, voir tout au long de mon existence.

- Ça c'est une très bonne question et je n'ai aucune réponse à vous offrir à l'heure actuelle.

J'aperçois le bar et même Ambre assise un peu plus loin, mais je tiens à terminer cette discussion. Le jeune homme me dit très rapidement qu'il a un rendez-vous auquel il ne pensait plus. J'ignore si c'est du lard ou du cochon mais bon, je ne peut pas dire non. J'ignore si il a remarqué ou non mon envie de rejoindre quelqu'un, mais je me permets tout de même un :

- Non bien sur allez y! Je suis moi-même attendu. Nous aurons peut-être la chance de nous revoir. Je l'espère en tout cas.

J'étais déjà sur le départ, lorsque je me rend compte que je ne sais même pas comment il s'appelle. Je lui sers donc la main pour lui dire au revoir et je lui signale pour terminer :

- Moi c'est Marie et ce fut un plaisir de vous rencontrer. A une prochaine.

Il me donne son prénom en échange, accepte ma poignée de main et je disparais entre les gens. Bientôt face ) Ambre que je prends dans mes bras et embrasse aussi fort que je le peux et lui fais un câlin. Nous nous sommes vu il y a deux jours pour la dernière fois, mais je compte bien en profiter un maximum, dieu seul sait pour combien de temps nous sommes là, avec toutes ses disparitions qui ont eu lieu ces derniers jours.